Par Bourse Afrique
Le 25 octobre 2024,

[PARIS] Le franc CFA, né en 1945, demeure l’une des monnaies les plus controversées d’Afrique, symbolisant à la fois un héritage colonial complexe et un ancrage dans une coopération économique régionale. Cette monnaie, divisée en deux zones, est aujourd’hui utilisée par 14 pays africains, regroupés en deux unions monétaires : l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). La France en garantit la convertibilité, tandis que des débats continuent d’animer le continent africain autour de son avenir et de ses alternatives. Cet article explore l’histoire du franc CFA, son fonctionnement actuel, et les défis auxquels il fait face dans un contexte de changements monétaires en Afrique.
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Une histoire marquée par la colonisation
Le franc des Colonies Françaises d’Afrique, ou franc CFA, fut instauré par la France en 1945 à la fin de la Seconde Guerre mondiale pour unifier les transactions économiques dans ses colonies africaines. À l’origine, le franc CFA désignait le “franc des Colonies françaises d’Afrique” pour les pays de l’Ouest et “franc des Colonies françaises du Pacifique” pour ceux de l’Afrique centrale et des territoires dans le Pacifique.
Lors des indépendances africaines dans les années 1960, la monnaie a été maintenue et renommée en “Franc de la Communauté Financière Africaine” pour les huit pays de l’UEMOA en Afrique de l’Ouest et en “Franc de la Coopération Financière en Afrique Centrale” pour les six pays de la CEMAC. Ces deux blocs économiques regroupent à eux seuls une population de plus de 150 millions de personnes et partagent un engagement dans une coopération monétaire régionale, malgré des désaccords persistants sur la gouvernance du franc CFA.
Les pays utilisateurs et fonctionnement de la monnaie
Actuellement, huit pays d’Afrique de l’Ouest utilisent le franc CFA au sein de l’UEMOA : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal, et le Togo. Du côté de l’Afrique centrale, les six pays de la CEMAC :le Cameroun, la République Centrafricaine, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, et le Tchad partagent également cette monnaie.
Le franc CFA est lié à l’euro par un taux de change fixe (1 euro pour 655,96 francs CFA) et garanti par la Banque de France, qui assure ainsi sa convertibilité. Chaque zone dispose de sa propre banque centrale, la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pour l’UEMOA et la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) pour la CEMAC. Ce système permet une stabilité monétaire, mais il impose également des limites à l’indépendance monétaire des pays utilisateurs, créant ainsi des débats sur la souveraineté économique et financière.
Les débats et critiques autour du franc CFA
Depuis des décennies, le franc CFA suscite un débat intense en Afrique. Pour certains économistes et dirigeants, cette monnaie représente un frein à la souveraineté économique des pays utilisateurs. Les principales critiques concernent :
- La dépendance monétaire : Le lien de la monnaie à l’euro limite la capacité des États à ajuster leur politique monétaire en fonction de leurs besoins économiques internes.
- La politique de dépôt des réserves : Les banques centrales africaines sont tenues de déposer 50 % de leurs réserves de change auprès du Trésor français, une disposition perçue par certains comme une entrave à l’indépendance financière des États.
- Le manque de compétitivité : Avec une monnaie forte, les économies basées sur les exportations, comme celles des pays de la CEMAC, se retrouvent parfois désavantagées dans le commerce international.
À l’opposé, d’autres voix soutiennent que le franc CFA assure une stabilité économique précieuse, surtout dans des régions où les fluctuations monétaires pourraient être déstabilisantes. Le taux de change fixe avec l’euro permet une inflation faible, des conditions favorables aux investissements étrangers, et un environnement relativement stable pour le commerce interafricain.
La réforme et l’avènement de l’Eco
Les critiques ont pris une ampleur particulière en Afrique de l’Ouest, où, depuis 2017, un projet de réforme a été lancé sous le nom de “Eco”. Ce projet vise à remplacer le franc CFA par une monnaie régionale ouest-africaine indépendante, dans le cadre de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). En 2019, la France et l’UEMOA ont annoncé la suppression du franc CFA et son remplacement par l’Eco, qui aurait dû voir le jour dès 2020. Cependant, des différends entre les pays de la CEDEAO ont freiné sa mise en œuvre.
Les divergences proviennent notamment des disparités économiques entre les pays de la zone, avec un Nigeria dominant économiquement mais farouchement opposé à une garantie de convertibilité comme celle offerte par la France pour le franc CFA. La transition vers l’Eco reste donc en suspens, alors que les pays continuent d’évaluer les risques et les bénéfices de l’abandon du franc CFA.
Les pays qui ont abandonné le franc CFA
Tous les pays d’Afrique francophone n’ont pas choisi de conserver le franc CFA. La Guinée, par exemple, a décidé de se retirer dès son indépendance en 1958, préférant créer sa propre monnaie. La Mauritanie, ancienne membre de la zone franc, a également adopté sa monnaie nationale, l’ouguiya, en 1973. Plus récemment, Madagascar et les Comores ont opté pour leurs propres devises, bien qu’ils continuent de coopérer étroitement avec la France dans le cadre de la zone franc. Ces pays ont fait le choix de leurs propres politiques monétaires, malgré les défis liés à la stabilité des monnaies.
Quel avenir pour le franc CFA ?
Aujourd’hui, l’avenir du franc CFA reste incertain et dépend des perspectives économiques, politiques et monétaires des régions concernées. En Afrique centrale, la CEMAC n’a pas entamé de projet similaire à l’Eco, préférant pour l’instant maintenir le franc CFA malgré les critiques. Mais en Afrique de l’Ouest, les aspirations pour une plus grande autonomie économique se renforcent, avec le soutien de plusieurs pays comme le Ghana, qui n’utilise pas le franc CFA mais pousse pour l’adoption de l’Eco.
La question du franc CFA reste cruciale pour l’avenir économique de l’Afrique francophone. Au-delà des aspects techniques, elle illustre le désir croissant de nombreux pays africains d’affirmer leur indépendance et de repenser leur modèle de développement économique. Les prochaines années s’annoncent décisives pour l’évolution monétaire de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale, et le débat autour du franc CFA continuera sans doute d’alimenter les discussions, entre souhait de stabilité et aspiration à l’autonomie économique.
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